La
genèse La série des envahisseurs est née de la rencontre
de Larry Cohen, le scénariste, et de Alan A. Armer, le producteur.
Tous les deux sont passionnés par l'espace, les étoiles et les ovnis.
Ils imaginent une série dans laquelle un héros combat des extraterrestres
que personne ne soupçonnent être sur la Terre. La solitude du personnage
principal doit renforcer l'angoisse qui domine. Larry
Cohen | | Il
faut aussi que ces extraterrestres ne se distinguent pas du commun des mortels.
Qui est humain et qui est extraterrestre ? Rien ne doit les différencier
... à part un petit détail que le spectateur attentif ne manquera
pas de repérer. Pour les distinguer, les extraterrestres auront un oeil
... dans la paume de chaque main ! Le ridicule de cet artifice n'échappe
pas à la chaine de télévision ABC, intéressée
par le projet, qui refuse catégoriquement. Elle avance aussi le prix du
trucage qui risque d'être élevé. | | Alan
A. Armer |
Nait alors l'idée d'une raideur
de l'auriculaire, utilisée avec parcimonie, et visible à l'écran
uniquement si le téléspectateur doit comprendre qu'il s'agit d'un
envahisseur.
Quinn
Martin | | 1966
voit commencer la phase de production de la série. Quinn Martin,
le producteur exécutif, profite de l'immense popularité de prestigieuses
séries qu'il a créées comme Les Incorruptibles en
1959, Le Fugitif en 1963, ou encore Sur la piste du crime en 1965
qui devait précéder Cannon en 1971 et Les rues de San
Francisco en 1972. Quinn Martin a une très forte personnalité
qui va se heurter d'emblée à Larry Cohen. Martin décide de
doubler la durée de chaque épisode : environ une heure et non pas
trente minutes. Il refuse tous les scripts de Cohen (22 !). Il engage enfin Roy
Thinnes dans le rôle de David Vincent. | | Roy
Thinnes |
C'en est trop pour Larry Cohen qui quitte
la série, ayant une idée radicalement différente du personnage.
Il conservera néanmoins la paternité de la série car il est
crédité à chacun des 43 épisodes. 25 ans plus tard,
il restera très flatté de la réussite de la série.
En fait, tous ses scripts ont été réécrits et non
pas purement délaissés. Vasquez
Rocks | | Le
tournage se déroulera très souvent dans des décors naturels.
Le désert, un des lieux par excellence de la série, concourt à
créer une atmosphère oppressante et angoissante. La solitude de
David Vincent n'en est que plus palpable. Que se passe-t-il au fond de cette mine
abandonnée ? Que teste-t-on dans ce centre d'expérimentation isolé
qui semble très surveillé ? Vasquez Rocks a de nombreuses
fois servi lors de tournages. Toute l'équipe se rendait à deux ou
trois heures de Los Angeles en bus. Ce qui faisait des journées de 16 à
18 heures, trajet compris, souvent sous un soleil de plomb. |
Quinn
Martin veilla particulièrement à ce que cette série reste
la plus réaliste possible. Il invitait aux réunions des scénaristes,
Roy Thinnes bien sur, mais aussi différents techniciens, tel que Andrew
McIntyre, le directeur de la photographie. Chacun pouvait donc donner son
avis et même avancer des idées. Il n'est pas étonnant de retrouver
dans les scénarios, une certaine idée de l'Amérique d'alors,
encore teintée de maccarthysme, dont les esprits étaient encore
confus. Beaucoup ont vu dans cette série, une métaphore de la montée
du communisme aux Etats-Unis une décennie plus tôt. Larry Cohen,
le scénariste, a reconnu que le thème de la paranoïa avait
été prévu, associée à la guerre froide d'une
crainte d'invasion communiste. Le tout sur une trame politique. Cette peur d'une
infiltration était idéale en remplaçant communistes par envahisseurs
extraterrestres. Dans
une Amérique bien-pensante, puritaine, qui croit en Dieu, les envahisseurs
passent pour l'incarnation du Mal et cristallisent l'archétype du démon.
Ne sont-ils pas dépourvus de cur, au propre comme au figuré
? Ne sont-ils pas "parmi nous", sans pouvoir être reconnus ? Qui
est un envahisseur ? Mon voisin ? Le chauffeur de taxi ? On ne connaitra même
pas le nom de leur planète d'origine, histoire de se faire au moins un
repère (sauf dans la version allemande où l'on apprend qu'ils viennent
de Vega, dans la constellation de la Lyre, à 25,30 années-lumières).
La paranoïa de l'époque est à son paroxisme. | | Invasion
von der Wega |
La science-fiction nous renvoie souvent notre
propre image. Dès lors, comme nul
n'est prophète en son pays, est-il si difficile
d'admettre que David Vincent passe pour un menteur
? Mais les braves gens n'aiment pas que l'on
suivent une autre route qu'eux, chanta Brassens
quelques années plus tôt.
La série s'arrêtera brutalement au 43ème épisode
sans que l'on sache encore de nos jours le réel motif de cet arrêt.
L'audience se portait bien, malgré un passage à l'antenne à
22H00 au lieu de 20H30. Des désaccords se sont-ils déclarés
entre la chaine et les producteurs ? Toujours est-il que Roy Thinnes a appris
la fin de la série alors qu'il était en congé, en lisant
le magazine Variety. | | Mais
d'où viennent-ils ? |
Il reste un grand
vide qui ne sera, hélas, jamais comblé. |